Elabakana Jeumon

26/06/2004
Projets

Projet

Elabakana, glissement perpétuel : Chronologie d’un dialogue artistique entre Madagascar et La Réunion (2003-2008)

Exposition collective réunissant autour du plasticien malgache, Richard Razafindrakoto, des artistes réunionnais : Térésa Small, Dominique Ficot et Christian Floy Jalma. Le sujet de cette exposition vise à engager une réflexion autour de thèmes complémentaires : – les liens – culturels, historiques, religieux – qui unissent Madagascar et La Réunion, – les fonctions qu’une société choisit de donner à certains objets : objets imaginés, objets détournés, rêvés ou sacrés. Accompagnant les oeuvres produites par les artistes, une petite exposition de Bako Rasoarifetra « Perles de Madagascar, histoire et tradition » présente l’histoire des perles et leurs fonctions à Madagascar.

Glissement perpétuel

Dans Elabakana, la découverte des facettes culturelles de l’océan Indien nourrit des pratiques artistiques actuelles. Le langage s’enrichit de formes originales. Il offre un nouvel essor à une plastique libre, interrogative et exploratrice, comme la puissante prosodie qu’on retrouve dans la littérature de la région.

Les perles, à la fois objets et phraséologies, sont des parures matérialisant flux et sens. Elles sont un esprit : la valeur du monnayeur, la collection de l’amateur, la spiritualité du religieux. Elles sont ces parties qui, au gré des inspirations, forment un tout changeant de beauté.

Les œuvres de ce glissement perpétuel mettent en forme les non-dit de l’écrit et de l’oral. Elles narrent un vécu de mémoires amputées par l’Histoire. Elles renouent avec un entendement empêché par les peurs humaines, les violences politiques ou larmes de l’oubli. Là où les dieux du verbe sont voilés, elles révèlent à l’œil, en langages singuliers, des paroles d’universel.

Ici, que perd un homme avec sa liberté ?

Il sait que la mer a avalé son passé. Braver le retour, c’est braver toutes ces morts qui l’ont jeté là, entravé. Rester c’est perdre.

Ravalés nom, aimés, postérité, ancêtres. Avalés langue, rites, sens. Dévalées toutes les chutes. Silence.

Tenter de restaurer, dans les hurlements intérieurs et le calme des pertes irrémédiables, les gestes, les traces, toutes les enceintes où s’investir. Risquer de perdre tout toujours. Inverser à l’infini ce glissement du destin dans la main de fer du pouvoir. De l’arbitraire.

Et perdre conscience des couleurs du pouvoir, prendre peur des couleurs de la liberté, se retourner contre l’autre, contre soi, dans l’ombre du maître.

Et retrouver l’interdit dans les formes, comme un pont sur la mer, dit, terre, un … liberté !

Christiane Rafidinarivo
Réunion, Madagascar, 26 juin 2004

Une démarche collective et transdisciplinaire

Elabakana se distingue par son approche collective et transdisciplinaire, privilégiant la co-production, la médiation active et l’implication de divers acteurs : artistes, chercheurs, musiciens, poètes et publics. Le projet interroge la circulation, la transformation et la valeur des objets et pratiques artistiques, tout en ouvrant de nouveaux espaces de dialogue et de remise en question des frontières culturelles.

Vers une quête universelle (2003-2008)

Tout au long de ces années, Elabakana dépasse le cadre de l’exposition pour questionner les regards portés sur la création, les dynamiques de pouvoir et la conciliation entre passé et présent. Véritable laboratoire d’expérimentation artistique et humaine, Elabakana s’impose comme un espace ouvert sur les transformations et les zones de contact qui enrichissent la région de l’océan Indien.

Genèse du projet (2003)

En 2003, lors d’une résidence de recherche à La Réunion, le plasticien malgache Richard Razafindrakoto initie le projet Elabakana. Dès cette année, des ateliers de recherche interdisciplinaires sont organisés, explorant l’influence des traditions malgaches sur la culture réunionnaise. Ce travail collectif aboutit à une première exposition à l’Espace Jeumon en 2004.

Exposition Elabakana, glissement perpétuel, Jeumon (2004)

Aux côtés de Richard Razafindrakoto, les artistes réunionnais Térésa Small, Dominique Ficot et Christian Floy Jalma s’engagent dans le projet. Ensemble, ils interrogent deux axes principaux :

  • Les liens culturels, historiques et religieux entre Madagascar et La Réunion
  • La valeur symbolique, sacrée ou détournée des objets dans les sociétés

Le musicien Jako Maron contribue à la création d’un environnement sonore inspiré des échanges issus des ateliers, tandis que la chercheuse Christiane Rafidinarivo (CEVIPOF) apporte une dimension scientifique à travers ses textes. L’archéologue Bako Rasoarifetra enrichit l’exposition d’une perspective patrimoniale, retraçant l’histoire et la symbolique des perles malgaches.

Ateliers de recherche à Antananarivo (décembre 2005)

Du 7 au 13 décembre 2005, l’association LERKA organise à Antananarivo trois ateliers de recherche interdisciplinaires, soutenus par plusieurs ministères malgaches. Ces ateliers, menés en partenariat avec l’association Vaïka, l’Institut de Civilisations et le Musée d’art et d’archéologie de l’Université d’Antananarivo, abordent trois thématiques majeures :

  • « De la culture à l’art »
  • « Langues et poésies du Grand Océan »
  • « L’émergence de l’art contemporain à Madagascar et à La Réunion »

Ces rencontres visent à créer une synergie entre les arts de l’océan Indien et à dynamiser la création artistique régionale.

Exposition « Elabakana, glissement perpétuel » à Betongolo (septembre-octobre 2006)

Du 27 septembre au 27 octobre 2006, l’exposition « Elabakana, glissement perpétuel » se tient au Hangar du Régiment d’Artillerie Anti-Aérienne à Antananarivo. La programmation comprend :

  • Performances musicales de Jako Maron et Ricky Olombelo
  • Défilé-performance sonore en partenariat avec le Centre Culturel Albert Camus
  • Kabarpoèm et poésie vivante avec Babou B’Jalah et l’association Madagaslam
  • Rencontres autour des perles malgaches avec Bako Rasoarifetra
  • Concerts, ateliers d’échange entre artistes malgaches et réunionnais, moments de poésie spontanée
  • Dans la nuit du 11 octobre 2006, à mi-parcours du déroulement de l’exposition qu’il avait initié, sur la terre qui l’a vu naître, Richard Razafindrakoto nous quitte, vaincu par la maladie. 

Hommage à Juliette Ratsimandrava (1935-2016), grande figure de l’intelligentsia et de la culture malgache. Membre éminente de l’Académie nationale malgache, elle s’est illustrée par son engagement indéfectible en faveur de la langue et de la culture de son pays. À la tête de l’Office national de la langue malgache, elle a également contribué à faire de la bibliothèque municipale d’Antananarivo un véritable pôle culturel, et a collaboré avec l’écrivain E.D. Andriamalala au ministère de la Culture. Précurseure dans la lutte pour l’émancipation des femmes, elle a fondé plusieurs associations et s’est investie dans l’autonomisation des communautés locales (fokonolona), notamment aux côtés de Roland Ramahatra. Sœur du Colonel Richard Ratsimandrava, chef d’État assassiné en 1975, elle a voué sa vie à la promotion culturelle, sociale et au rayonnement de Madagascar, s’appuyant sur de nombreux réseaux, dont les milieux protestants.
Sans son appui, Elabakana n’aurait pas pu voir le jour avec autant de force et d’enthousiasme.

Repères biographiques

Iarilanto Patrick Andriamangatiana estprofesseur de malgache.Ecrivain bilingue dans  le domaine de la poésie, de nouvelles et du roman, il a participé et a été lauréat plus d’une fois dans différents concours organisés par  la RFI et l’ACCT. Son roman intitulé “ Vakivakimpiainana ” a reçu le premier prix du concours littéraire UPEM et figure aujourd’hui parmi les œuvres étudiées au niveau de l’enseignement secondaire et à l’Université. Il est aussi Vice –président de Havatsa-Upem et préside l’atelier “ technique littéraire ” au sein de cette association.

Professeur Titulaire Emérite, Université d’Antananarivo Titulaire de l’Habilitation à Diriger des Recherches (HDR) et du Doctorat en Anthropologie, Ethnologie, Préhistoire de l’Université de Paris 1 (Panthéon-Sorbonne), Rafolo Andrianaivoarivony est actuellement Professeur Titulaire Emérite de l’Université d’Antananarivo, Enseignant-Chercheur d’archéologie, de patrimoine et de sciences du tourisme retraité de la Faculté des Lettres et Sciences Humaines. Ancien directeur de l’Ecole Doctorale « Sciences Humaines et Sociales » de l’Université d’Antananarivo regroupant la Faculté des Lettres et Sciences Humaines, la Faculté de Droit et Sciences Politiques et la Faculté d’Economie, de Gestion et de Sociologie, le Professeur Il a dirigé également au sein de la Faculté des Lettres et Sciences Humaines deux laboratoires : le Centre d’Art et d’Archéologie et le Centre de Recherche et d’Etudes sur les Constructions Identitaires. Il est membre titulaire de l’Académie Malgache.

Hemerson Andrianetrazafy est S.G. de l’Association VAIKA, artiste plasticien, historien d’art au Centre d’Art et d’Archéologie, Département des Civilisations, Université d’Antananarivo, Membre titulaire de l’Académie Malgache.
Maj : juin 2025

Willy Techer, connu sous le nom de Babou B’Jalah, est un artiste et activiste réunionnais né en 1977 à Saint-Pierre, La Réunion. Issu d’une famille modeste, il grandit au Tampon, où il fait ses études, obtenant un baccalauréat puis une licence en Sciences de l’Éducation. Engagé dans l’éducation populaire, il travaille pour plusieurs associations et s’investit également dans le journalisme, notamment au sein du magazine Nout Lang et du journal Témoignages.En 2010, il s’installe à Toulouse, où il écrit plusieurs recueils de poésie fonnkèr et une nouvelle, qu’il diffuse de manière originale en inscrivant ses textes sur des galets. Il exerce aussi comme journaliste indépendant et animateur de formation. De retour à La Réunion en 2015, il poursuit son engagement dans l’éducation et l’animation de projets, tout en développant ses activités artistiques et en œuvrant pour la valorisation du maloya, musique emblématique de l’île.
Maj : juin 2025

Patricia de Bollivier est membre de l’AICA, chercheure-associée au Laboratoire LCF-EA 7390 Université de La Réunion.
Elle a dirigé l’École Supérieure d’Art de La Réunion entre 2014 et 2021, après avoir assuré la coordination technique du projet de centre d’art ainsi que la gestion et la valorisation de la collection d’art contemporain de Ville de Saint-Pierre. Elle a pendant une dizaine d’années enseigné la théorie des arts à l’ESA Réunion, l’Université de La Réunion et l’ENSAM-Antenne de La Réunion et assuré la direction de divers projets artistiques (résidences, commissariats d’exposition, éditions). Docteure de l’EHESS en sciences de l’art, sa spécialisation et ses domaines de recherche portent sur la création visuelle à La Réunion : spécificités, rapports au(x) territoire(s), à l’Histoire, rapport aux modèles, problématiques postcoloniales, créolisation, nouveaux récits, nouvelles approches. Maj : juin 2025

Antoine du Vignaux né au Maroc en 1955 est plasticien-médiateur. Il vit et travaille à La Réunion depuis 1985. Membre fondateur de Lerka, espace de recherche et de création en arts actuels il coordonne depuis juin 2002 les projets artistiques de l’association.

Nicolas Gérodou est né en 1969, en Périgord noir, près de Lascaux. Poète, traducteur, critique, Nicolas Gérodou dirige la réédition des Révélations du Grand Océan de Jules Hermann. Il est notamment l’auteur de recueils poétiques et d’une anthologie traduite de la poésie orale de Madagascar. Membre du collectif Lerka, il enseigne à l’École supérieure d’art de La Réunion (ESAR). il participe également à la revue Lettres de Lémurie.
En 2024, il écrit une enquête stupéfiante pour petits et grands Lémurie – Le continent des rêves illustrée par Natacha Éloy et publiée par Feuille Songe.
Source : la-reunion-des-livres.re, Maj : juin 2025

Christiane Rafidinarivo, est Chercheuse associée Centre de recherches politiques (CEVIPOF), Docteure Habilitée à Diriger des Recherches en Science Politique, Université de la Réunion et Docteure en Science Politique, Université de Toulouse. Elle est diplômée de l’Institut d’Administration de l’Entreprise et de l’Institut d’Etudes Politiques de Toulouse, section Economie-Finances. Elle est Professeure associée en Science Politique, Relations Internationales et Géopolitique et Présidente du Conseil Scientifique de l’Institut d’Etudes Politiques de Madagascar. Elle est Enseignante-Chercheure et Chercheure associée au Laboratoire de recherche sur les espaces Créoles et Francophone de l’Université de La Réunion. Elle est Présidente de l’Association Océan Indien de Science Politique et membre de l’Australian-French Association for Research and Innovation.
Maj : juin 2025

Henri Rahaingoson connu sous le pseudonyme Di est chercheur-enseignant en communication à l’Université d’ Antananarivo. Ecrivain tant en malgache qu’en français, il s’est donné pour devise “ Andrianiko ny teniko, ny any hafa koa feheziko /Ma langue, je la fais souveraine, quant à celle d’autrui, je la fais  mienne et la maîtrise aussi ”. Restée en grande partie inédite, sa poésie est caractérisée par un humour presque voltarien. On lui doit aussi plusieurs traductions d’œuvres classiques et modernes dans les deux langues malgache et française. Il est le président de l’association d’écrivains et de poètes malgaches Havatsa-Upem. Il est né le 26 novembre 1938 à Antananarivo et décède le 13 avril 2016 dans la même ville.
Maj : juin 2025

Bako Rasoarifetra est une historienne de formation, spécialisée en archéologie, muséologie et patrimoine. Elle occupe actuellement le poste de chercheur associé à l’Institut de Civilisations Musée d’Art et Archéologie de l’Université d’Antananarivo, où elle enseigne l’archéologie, la muséologie et le patrimoine. Ses travaux de recherche se concentrent sur la culture matérielle, et elle a publié de nombreux articles, tant au niveau national qu’international, sur le patrimoine matériel et immatériel de Madagascar.
Engagée dans la valorisation du patrimoine culturel malgache, Bako Rasoarifetra est également très active au sein de plusieurs institutions prestigieuses. Elle est membre titulaire de l’Académie Malgache, membre de l’ICOM (Conseil International des Musées) pour l’Alliance Régionale Afrique, de l’ICOMOS (Conseil International des Monuments et des Sites), ainsi que du GRAN (Groupe de Recherches en Archéologie Navale). Son engagement et ses recherches ont largement contribué à la reconnaissance et à la préservation du patrimoine culturel de Madagascar sur la scène internationale.
Maj : juin 2025

Richard Razafindrakoto, agitateur culturel infatigable et généreux, mène de front à Madagascar plusieurs chantiers : structuration du secteur artistique, accompagnement de jeunes artistes, réflexion sur la place de la création actuelle dans la société malgache, conception d’événements artistiques. Mais au cœur de ces nombreuses missions, c’est l’impérieuse nécessité “ de faire connaître les facettes cachées, ou oblitérées de la culture malgache et de réconcilier I’expression plastique malgache avec la richesse de I’univers des formes traditionnelles ” qui nourrit l’œuvre de Richard Razafindrakoto, plasticien. Il expose en collectif où seul. Il a été au cœur du développement du projet Elabakana, glissement perpétuel. Dans la nuit du 11 octobre 2006, à mi-parcours du déroulement de l’exposition qu’il avait initié, sur la terre qui l’a vu naître, Richard Razafindrakoto nous quitte, vaincu par la maladie.
Maj : juin 2025

Lolona Razafindralambo est enseignante-chercheure, maître de conférences en anthropologie à l’Université d’Antananarivo.
Elle s’intéresse à la dynamique des cultures et des identités, en particulier dans le contexte des sociétés contemporaines et de la mondialisation. Ses travaux portent sur la formation des groupes sociaux et leur insertion dans des ensembles plus englobants. Les enseignements dont elle a la charge portent aussi bien sur l’anthropologie générale, l’étude de la culture, l’anthropologie de l’art, que sur la problématique du développement.
Source : concoursfonenana.com, Maj : juin 2025

Du 26 juin au 31 juillet 2004, Espace Jeumon Saint-Denis de La Réunion 

  • Régie générale, éclairage : Richemont « roots » Gilas
  • Technicien montage expo : Valère Timon, Thierry Lesauvage
  • Stagiaire technicien montage expo : Temandrota, Rakotoarivony Eric 
  • Accueil du public : JeanSébastien Clain
  • Créations poétiques : Patrice Treuthardt, Nicolas Gérodou
  • Création sonore : Jako Maron, d’après les échanges enregistrés dans le cadre d’un atelier-recherche organisé à Lerka le mercredi 24 mars 2004
  • Fabrication des perles exposées : Rasomanandray Sabine, Rakotoarisoa Jacky
  • Photos des perles : Ibrahim Mulin
  • Consultante et écriture des textes : Christiane Rafidinarivo 

« Perles de Madagascar : histoire et tradition » Commissariat: Bako Rasoarifetra 

PERFORMANCES, KABARY, RENCONTRES, CONCERTS

26 JUIN / Vernissage de l’exposition

“Ny lalamben’ny velona” : Performance de Richard Razafindrakoto, Patrice Treuthardt, Jako Maron et Suppahgil.

29 JUIN / Avec Elabakana : Conférence avec Bako Rasoarifetra, archéologue et historienne, Christiane Rafidinarivo, politologue, Patricia de Bollivier, ensei-gnante à l’école des Beaux Arts de La Réunion, Richard Razafindrakoto, artiste plasticien. 

 6 JUIL. / ArcHéologues du quotidien: conférence avec les observateur-chercheur Christian Floy Jalma et Stéphane Gilles.

9 JUIL. / Elabakabar, Lanbians Fonnkèr: Avec Nathalie Natiembé, Patrice Treuthardt, Francky Lauret, Jako Maron, Babou B’jalah, Nicolas Gérodou, Christiane Narisoa, Dominique Carrère. 

Résidences de Richard Razafindrakoto à La Réunion 

FÉVRIER 2003 : Résidence de Richard Razafindrakoto : rencontres avec des plasticiens, écrivains et chercheurs. • 

MARS 2004 : Résidence et atelier-recherche avec Richard Razafindrakoto réunissant des artistes – plasticiens, écrivains – et des chercheurs afin de donner une forme définitive à l’exposition Elabakana. 

Artistes