Limazinèr Parole d’images

20/10/2005
Projets

Projet

DEMARCHE ARTISTIQUE

Cette action artistique se donne comme objectif de permettre à un large public de découvrir des aspects de la culture malgache. S’inscrivant dans l’opération « semaine kréol » et « Lire en Fête » Limaziner, paroles d’images présente une sélection de proverbes malgaches dialoguant avec des photographies réalisées par Philippe Gaubert autour de certaines coutumes malgaches.

ARTISTES

Philippe Gaubert, photographe
Nicolas Gérodou, écrivain

OBJECTIFS

  • Valoriser les liens – culturels, historiques, religieux – qui unit Madagascar et La Réunion ;
  • Permettre à un large public d’accéder à des créations artistiques.
  • Faire connaître les formes poétiques malgaches traditionnelles, hein-teny, kabary, etc, en proposant une sélection de textes malgaches traduits en français et en kréol. Chaque texte est accompagné d’une photographie de Philippe Gaubert.

SUPPORTS DE DIFFUSION

  • 12 affichettes noir et blanc, bichromie
  • 1 face avec photo, 1 face avec poésie
  • Dimension : 39 cm X 32 cm
  • 2 affichettes recto-verso par bus

Réalisation d’un portfolio des 12 affichettes avec un texte de Andrianetrazafy Hemerson sur les photographies de Philippe Gaubert et de Nicolas Gérodou sur les traditions poétiques malgaches.

300 exemplaires

LIEUX DE DIFFUSION

195 affichettes dans 100 bus urbains desservant Saint Denis, Saint Pierre, Saint Louis, et Le Port
Réseaux : Citalis, Semitel, Semto

PUBLICS CIBLÉS

Les usagers des transports en commun / 80 000 personnes par jour

DUREE DE L’ACTION

Du 17 au 31 octobre 2005

Olombelona

Extrait d’un texte de ANDRIANETRAZAFY Hemerson
Département de Civilisations, Centre d’Art et d’Archéologie, Université d’Antananarivo

« Tout au long de son parcours, Philippe GAUBERT a eu le privilège de côtoyer et d’observer ces Olombelona. Assistant à leur quotidien, participant à leurs extraordinaires, il lui arrive d’investir les lieux les plus inattendu pour les voir tisser leurs réseaux de sociabilité à travers leurs rituels ou leurs jeux.

À maintes reprises, Il eût le loisir de les scruter entassés à l’intérieur de voitures cahotantes qui parcourent les pistes malgaches ; d’écouter leur silence à peine perturbé par le crissement des pneus sur la piste et le geignement grinçant de la suspension ou le ronronnement essoufflé du moteur.

Pensifs, ces hommes et ces femmes entreprennent sûrement un double voyage dans l’espace et dans l’imaginaire. Ils se perdent au fond de leurs propres regards, en transit dans une poche temporelle où ils peuvent entamer le parcours parallèle qui les amènera ailleurs, au plus profond d’eux-mêmes.

Se déroulent alors dans cet espace intime, des scènes muettes et silencieuses mais combien tumultueuses de rêves à assembler, de vœux à formuler ».

Ohabolana — paroles d’images

Pour accompagner cette série photographique emblématique du travail de Philippe Gaubert, les sources textuelles s’imposaient d’elles-mêmes : la culture malgache vivante ne manque pas d’associer à un spectacle visuel une sentence proverbiale, tantôt obscure, tantôt lumineuse, toujours profonde. La nature du proverbe est certes universelle : sentence gnomique, comparaison et image (ohabolana : « parole de comparaison »), qui fonctionne par glissement du sens, par surimpression. Ohabolana et hainteny se caractérisent donc d’abord comme des paroles imagées : elles fonctionnent le plus souvent sur les symboles courants de la culture malgache — animaux, objets quotidiens ou notions complexes comme le vintana ou le fihavanana . Mais ce sont aussi des paroles imageantes : elles ont vocation à retranscrire, à mettre en scène le réel par déplacement, elles font sens par le décalage, le jeu ou la jointure entre la parole et la réalité… Dans ce tissage du discours et du monde, on retrouve sans doute un trait caractéristique du discours gasy : en puisant dans le fond proverbial, l’orateur  construit la marqueterie du hainteny par une combinaison de ohabolana : à chaque kabary (joute oratoire), il intégrera de nouvelles variations, choisira des sentences adaptées à la situation du jour… dans cette série Olombelona, le lien de l’image et du texte est similaire à l’art du kabary, il opère sur le rapprochement du réel (l’image, fragment de réalité) et de l’idéel (ohabolana, fragment de vérité, perle énigmatique de savoir)… 

Le proverbe est donc une figure centrale de la perception malgache du monde, un  concentré de poésie, « une éloquence à la fois dévorante et imperceptible, comme une flamme allumée en plein midi» dit Rabearivelo ; parole étrange et familière, comme l’est la culture malgache en terre réunionnaise, « étrangère intime » pour reprendre l’expression de Paul Ottino… Vérité de coureur des bois : rencontrant dans la forêt primaire de La Réunion un arbre indigène de lui inconnu, il s’exclame : « Sa tin boi malgas, sa »… C’est dire à quel point la part malgache occupe une position particulière dans la culture réunionnaise, à la fois intégrée à l’identité créole et inconnue, familièrement étrangère ou étrangement familière…
Nicolas Gérodou, septembre 2005

LIMAZINER, PAROLES D’IMAGES, choix de textes

Le soleil et l’ombre :
ils ne luttent pas entre eux

Masoandro sy aloka
Tsy mba mifaninana

Soley èk lonbraz
Rant zot dé na poin batay

N’embrassez pas la foudre
ne portez pas sous le bras une étoile filante
de crainte d’être vous-même emporté

Aza mitrotro varatra
Aza misakelika fantara
Fandrao entiny miriatra

Alé pa anbrass zéklèr
Alé pa brat in zétoil filante
Pangar i ral aou

Le juste est comme la roche plate des sacrifices :
on peut l’établir n’importe où 
elle est toujours à sa place

Ny olo-marina hoatra ny vato lava sorona
Izay ametrahana azy, marina avokoa.

In moun droite lé parey in rosh plate pou fé sakrifiss
Sof kel koté ou mèt ali, i tonm son plass mèm

Le fer 
s’il demeure solitaire
se rouille

Ny vy
Raha mitoetra irery
Harafesina

Dofèr
Si li rèt son tousèl
I gingn la rouy

Le chagrin, comme le riz dans le grenier 
chaque jour, il diminue d’une petite mesure

ny alahelo toy ny vary an-tsompitra
ka ahafahanairay fatambary isan-andro  

Shagrin, parey dori dann farfar
Toulézour i tir inndé mok